RoughTough&Dangerous

 

 

 

Sommaire
Les Avions Furtifs
Le SR-71 Blackbird
La propulsion nucléaire
La conquête spatiale
Dossier spécial ISS
1
les origines
2
les attributions
3
l'anatomie de la station
4
l'assemblage de la station
5
l'utilisation de l'ISS
6
la vie à bord
7
la sécurité
Espace
Liste de Films
Photos
Contact

 

Dossier spécial ISS :

 

Partie 5: l'utilisation de l'ISS

Comme on l'a vu, le besoin de disposer d'une station spatiale s'est fait ressentir très tôt dans l'histoire de l'astronautique. Mais une fois assemblée en orbite, à quoi servira-t-elle ?

Depuis le début du projet, les agences spatiales, NASA en tête, insistent sur les caractéristiques propres à l'environnement qu'elle nous offrira. L'absence quasi-totale de pesanteur, ainsi que le vide presque absolu à l'extérieur en font un lieu privilégié.

Si le vide est relativement aisé à obtenir en laboratoire, quoique dans des volumes assez limités, il n'en va pas de même de l'apesanteur. En environnement terrestre, seulement deux moyens s'offrent aux scientifiques: la chute libre et le vol hyperbolique.

Si nous lâchons un objet quelconque, il se mettra aussitôt à tomber sous l'influence de la force d'attraction de notre planète. De fait, il connaîtra une accélération continue de sa vitesse égale à environ 10 mètres par seconde, qui peut varier suivant la latitude et l'altitude. Elle équivaut à 9,81 mètres/seconde à Paris, mais seulement 9,78 mètres/seconde au sommet de l'Everest simplement parce que l'on s'éloigne du centre de la Terre. Cette force, qui est ici de 1G, est indépendante de la masse de l'objet.

La Station Spatiale Internationale, telle qu'elle se présentera à l'issue de sa construction.

En théorie, une balle de plomb et une plume devraient tomber exactement à la même vitesse si nous les lâchons ensemble. Dans la pratique il n'en n'est rien, car le frottement contre l'air ambiant aura pour effet de freiner davantage l'objet dont la densité est la plus faible. Et dans notre exemple, la balle de plomb sera au sol depuis bien longtemps lorsque la plume l'atteindra en voltigeant… Dans le vide il en va différemment, l'atmosphère n'est plus là pour produire son effet dérangeant et les deux objets arriveront simultanément au sol. L'expérience a d'ailleurs été démontrée sur la Lune par les astronautes d'Apollo 17, avec un marteau et une plume (d'aigle).

Obtenir un état d'apesanteur en chute libre n'est donc pas aisé sur Terre. Lâcher un objet depuis un avion ou une nacelle d'aérostat ne sert pas à grand-chose, sinon à fortement réduire l'effet de la gravitation, mais la friction atmosphérique contrariera la chute et empêchera l'ensemble d'atteindre la vitesse d'accélération constante de 1G. Même un parachutiste en chute libre cesse d'accélérer lorsque sa vitesse atteint environ 250 km/heure.

Un moyen existe cependant : la tour de chute libre. La plus haute est installée au Japon, et mesure 500 mètres. Une "cabine" est lâchée en son sommet, embarquant diverses expériences, et un système d'accélération compense le freinage qu'elle peut subir durant sa chute. Une sorte d'ascenseur à l'envers… Grâce à ce dispositif, une valeur de 10^-5G peut être obtenue durant environ 10 secondes.

Le vol parabolique est un autre moyen. Un avion suivant une trajectoire courbe peut arriver à recréer un état d'apesanteur de 10^-3G durant une période d'environ 1 minute. Outre une durée d'expérimentation plus importante, on dispose aussi d'un volume bien plus vaste et de la possibilité d'emporter plusieurs passagers, ce qui est particulièrement précieux lors de l'entraînement d'astronautes.

On pourrait aussi citer certains tirs de roquettes, comme le Texus, pouvant recréer un effet de non pesanteur pour des périodes allant jusqu'à 10 minutes, mais l'accélération subie au départ en interdit l'usage dans bien des cas. Les satellites artificiels récupérables, ainsi que la navette spatiale, offrent un état d'apesanteur pour des durées allant jusqu'à une vingtaine de jours dans le cas du Shuttle, mais pour un nombre de vols très limité et surtout de coût prohibitif.

L'état de micro-gravité associé à la Station Spatiale Internationale se révèlera donc extrêmement précieux, notamment si l'on considère sa durée, égale à la vie de la station elle-même : 15 à 20 ans de façon continue.

Déjà, les recherches menées avec le laboratoire européen Spacelab embarqué à bord de la navette ont offert, durant des périodes de une à deux semaines, un environnement approprié aux expériences à mener en microgravité comme la solidification, la croissance des cristaux, l'étude des phénomènes de fluides et les recherches biotechnologiques. Les résultats obtenus ont permis une meilleure compréhension des processus et des phénomènes fondamentaux mais ont aussi fortement contribué à l'optimisation de processus industriels sur Terre dans des applications telles que la coulée, la combustion ou les écoulements multi-phases ainsi qu'à l'amélioration de soins comme le traitement de l'ostéoporose et le développement de nouveaux produits pharmaceutiques.

La Station Spatiale Internationale sera le lieu idéal pour poursuivre et approfondir ces travaux sur une base beaucoup plus continue et surtout plus régulière que les missions Spacelab, relativement courtes et peu fréquentes. Les expériences entreprises pourront à volonté être répétées soit dans des conditions identiques, soit en modifiant certains paramètres, ce qui n'était pas possible lorsque la durée de la mission était limitée.

 

La microgravité au service de la recherche commerciale

Dans son environnement très particulier, la Station Spatiale Internationale pourra être considérée comme un laboratoire scientifique de pointe, et le banc d'essai par excellence des technologies futures. Elle offrira une installation de recherche avancée dans le domaine de la médecine, de la biologie et de la science des matériaux.

Délivrés de la pesanteur, les ingénieurs et chercheurs du monde entier pourront obtenir et étudier les matériaux dans leur forme la plus pure, grâce notamment à des processus nouveaux, dont beaucoup restent encore à découvrir, impossibles à obtenir sur Terre à cause de la pesanteur.

Parmi ces matériaux, on peut considérer les polymères, aujourd'hui très répandus et présents dans notre vie de tous les jours puisqu'ils entrent dans la composition des peintures, de nombreuses matières plastiques, des lentilles de contact, mais aussi toute la gamme des semi-conducteurs dont l'informatique fait de plus en plus usage, des supra-conducteurs à haute température qui nous permettront dans un avenir proche de transmettre l'énergie sans déperdition, ainsi que de cristaux nouveaux, notamment à usage chimique ou médical, entre autres.

Dans l'industrie automobile ou aéronautique, de nouveaux matériaux, insoupçonnés voici seulement dix ans, permettent de réaliser des économies de poids substantielles aboutissant sur une plus grande efficacité et un accroissement d'autonomie tout en réduisant la consommation et la pollution. Or, la plupart de ces composants sont actuellement réalisés par usinage, solution coûteuse et génératrice de déchets dont il serait possible de se passer si un procédé de fabrication par injection directe et moulage de précision était mis au point. A bord de la Station Spatiale Internationale, l'étude en microgravité des alliages en fusion fournira des informations sur certains processus encore mal connus se produisant au cours de la solidification.

La recherche en microgravité sera organisée de façon à déboucher sur des améliorations de processus industriels existants. Par le passé, de telles recherches, conduites pour des buts purement scientifiques, ont déjà abouti à des applications concrètes utilisées dans l'industrie pour apporter des solutions à des problèmes pratiques. Il s'agit là de l'essence même de la recherche fondamentale.



La microgravité au service de la médecine

L'état d'apesanteur à bord de la Station Spatiale Internationale permettra l'observation et l'étude du fonctionnement du corps humain sous un angle complètement différent, libéré de la plupart des contraintes liées à la gravité. Des progrès considérables sont attendus dans la connaissance du fonctionnement du cœur, des poumons et des reins, sur les maladies cardio-vasculaires, la perte du calcium osseux (ostéoporose) et les troubles hormonaux. Cette vision de la machine humaine sous un angle nouveau pourrait aboutir à de nouveaux moyens de traitement et de prévention des maladies.

Des expériences récemment menées à bord de la navette spatiale américaine, ainsi qu'à bord de la station Mir, ont révélé que l'apesanteur constituait aussi un milieu irremplaçable pour l'étude de la structure et des fonctions des protéines, ce qui pourra déboucher sur l'amélioration du développement de médicaments et de la recherche dans le traitement de nombreuses pathologies.

Depuis longtemps déjà, les systèmes mis au point pour le suivi médical des astronautes ont trouvé, après adaptation, diverses applications dans les hôpitaux sur Terre.


La recherche fondamentale en microgravité

La recherche fondamentale occupe les devants de la Science depuis que l'Homme s'est mis à penser. Peu de problèmes trouvent une solution sans qu'un principe issu de la recherche fondamentale, à n'importe quel niveau, soit évoqué. L'Homme a découvert le feu avant de l'utiliser pour cuire ses aliments, et au début, probablement le craignait-il sans en trouver d'applications pratiques. L'Histoire est jalonnée de découvertes qui n'ont trouvé un usage que bien plus tard. Aujourd'hui, ces expérimentations, riches en applications potentielles qui, quelquefois, se révèlent très vite, sont organisées selon des programmes de recherches organisés précisément. C'est la base de la recherche fondamentale telle qu'elle est maintenant conçue.

Cette recherche fondamentale porte essentiellement sur deux grands axes : la physique et la biologie. La physique débouche sur des voies telles que la physique atomique, la physique relativiste, la science des matériaux, la science de la combustion ou la physique des fluides, tandis que la biologie s'ouvrira sur les biotechnologies fondamentales, la croissance des cellules. Cela n'étant absolument pas exhaustif.



La physique

Jusqu'à présent, notre compréhension des lois physiques était limitée par les conditions d'expérimentation imposées par notre environnement terrestre et la force de gravitation qu'il induit inévitablement. Mais de nouvelles expériences conduites en microgravité font évoluer nos connaissances, non seulement par le fait de l'absence de pesanteur, mais aussi par l'absence d'éléments perturbateurs omniprésents sur Terre tels les vibrations sismiques.


Tout qui a un jour tenté de réaliser un hologramme en laboratoire au moyen d'un laser He-Ne de faible ou moyenne puissance est familiarisé avec ce problème. Même en utilisant un banc optique très stable comme support, le moindre mouvement, le moindre pas effectué dans l'enceinte de la pièce durant les quelques secondes d'exposition de la plaque photographique aux faisceaux croisés du laser peut irrémédiablement altérer la formation des franges d'interférence. Parfois, un simple véhicule passant dans la rue, à plusieurs dizaines de mètres de là, peut produire le même effet néfaste. Par vibrations sismiques, il ne faut donc pas considérer seulement les secousses telluriques proprement dites, mais aussi, et surtout, la multitude de vibrations transmises en permanence au sol par l'industrie, la circulation, ou le fonctionnement de l'importe quelle machine. Tout mouvement, même lointain, peut avoir un effet désastreux sur les manipulations en laboratoire, et réduire à néant les résultats d'une coûteuse expérience.

Dans l'espace, de tels problèmes ne se posent pas. De plus, l'espace étant naturellement "froid" par absence de convection, il est plus aisé d'y atteindre de très basses températures que sur Terre. Cela est impératif dans certaines expérimentations exigeant de s'approcher de "points critiques", comme certaines conditions particulières où un corps se trouve à la fois à l'état liquide et à l'état solide, dans le cadre de la recherche en supraconductivité (état ou un solide n'oppose plus aucune résistance au passage d'un courant électrique, donc ne provoque plus aucune déperdition) ou de suprafluidité (état où un liquide ne présente plus aucune résistance à l'écoulement).



La science des matériaux

L'industrie moderne fait largement appel à de nouveaux matériaux, et pour des besoins très particuliers, cherche à en produire dont les caractéristiques conviennent le mieux aux usages pour lesquels ils sont destinés.

Parmi les nouvelles matières intéressant le plus la technologie aujourd'hui, on peut citer :

Les Polymères, c'est-à-dire des molécules organiques, bases de toutes les matières plastiques, qui apparaissent aussi naturellement dans la laine ou le bois, et sont synthétisées en vue de produire le nylon et toutes les fibres synthétiques modernes, les polystyrènes.

Les Verres et Céramiques, formés à partir de longs arrangements d'atomes non métalliques offrant la propriété de résister aux très hautes et très basses températures.

Les métaux et alliages métalliques, largement utilisés dans l'industrie.

Les semi-conducteurs, de plus en plus utilisés dans de nombreux domaines, électronique, informatique, mais aussi dans les capteurs CCD, lasers, etc.

 

Il n'existe pas, actuellement, d'exemple de nouveau matériau ayant été produit exclusivement dans l'espace, les temps d'expérimentation ont jusqu'à présent été trop courts pour pouvoir entreprendre une telle recherche. Cependant, plusieurs expériences menées tant à bord de la station Mir (four Kristal notamment) que du Spacelab ont permis de constater que l'expérimentation dans ce domaine pouvait être optimisée dans le milieu spatial de manière à obtenir des résultats bien plus sûrs et surtout moins aléatoires qu'en conditionnement terrestre.

En effet, on constate qu'un matériau en cours de solidification sur Terre a tendance à former des strates induites par les courants de convection qui se créent au sein de la matière en cours de refroidissement. En apesanteur par contre, ces courants de convection sont absents et la matière solide obtenue présente une régularité et une homogénéité impossibles à réaliser au sol.

Dans les cas de très petites structures, ce phénomène peut se révéler dramatique, surtout lorsqu'il s'agit de réaliser, notamment, des semi-conducteurs à l'échelle nanométrique. La microgravité d'une station spatiale devient dès lors le lieu incontournable de la recherche fondamentale dans le domaine des matériaux de pointe.

Certains matériaux ou alliages ultra-purs voient aussi leur élaboration facilitée en apesanteur, leur solidification sans aucun contact avec les parois d'un récipient supprimant tout risque de contamination par des impuretés.

 

La science de la combustion et la pollution

85% de la quantité d'énergie utilisée aujourd'hui dans le monde repose sur le principe de la combustion. Mais cette forme d'énergie a un prix, celui de la pollution qu'elle induit immanquablement en rejetant dans l'atmosphère de nombreux résidus. Un moyen très simple de réduire considérablement cette pollution serait d'augmenter le rendement de la combustion. Mais ce mécanisme est encore très mal connu.

Vouloir obtenir une combustion complète sur Terre est aléatoire, et ce en raison de la gravité qui induit un fort courant de convection entre la source de chaleur et les gaz incandescents qu'elle produit: c'est la flamme que l'on observe au-dessus de la mèche allumée d'une bougie. La couleur jaune brillant de cette flamme indique d'ailleurs que la combustion est très incomplète et émet en abondance des résidus imbrûlés. En apesanteur, cette même flamme se réduit à une petite zone bleutée faiblement visible, sans convection. Son manque d'intensité indique que la combustion est complète et les rejets pratiquement nuls. En corollaire, le rendement énergétique est bien supérieur.

Arriver à comprendre les mécanismes d'une combustion complète et arriver à la reproduire sur Terre, éventuellement par d'autres moyens que l'absence de pesanteur, permettrait de résoudre un des problèmes les plus épineux qui se posent aujourd'hui à l'humanité: celui de la pollution. Plusieurs programmes de recherches sur la combustion sont d'ores et déjà programmés à bord de la Station Spatiale Internationale, tant dans les modules américains qu'européens.

 

La biotechnologie

La biotechnologie repose sur la biologie et est à la base de toute recherche dans ce domaine. Elle réclame de nombreuses manipulations de tissus, d'organismes vivants, mais aussi de molécules complexes.

Sur Terre, ces manipulations sont souvent compliquées par le simple fait que la force de gravitation déplace les cellules en cours de multiplication vers le fond des boîtes de culture, contrariant leur agencement en trois dimensions. En micropesanteur par contre, les cellules restent en suspension et se répartissent selon une organisation totalement naturelle, ce qui permet de mieux comprendre les mécanismes de leur genèse et de leur croissance. De plus, il semblerait aussi que des tissus cancéreux se multiplient beaucoup plus lentement en apesanteur qu'au sol, mais la faible durée des expériences entreprises jusqu'à présent n'a pas permis de le confirmer.

On le voit, le rôle de la Station Spatiale Internationale est prépondérant aussi dans ce domaine, qui n'est qu'un des nombreux exemples dans le vaste territoire de la Science du Vivant.

A bord du module européen Columbus, l'instrument Biolab, notamment, sera consacré aux expériences sur les micro-organismes, les cellules animales, les cultures de tissus, les petits végétaux et les petits invertébrés.

L'aspect humain

Un aspect non moins important de la Station Spatiale Internationale sera apporté par sa définition même: faire vivre et collaborer une population composée d'individus d'une quinzaine de pays, de cultures et de langues très différentes. La conduite des opérations à bord de cet espace restreint impose une collaboration, voire une complicité de tous les instants, souvent de la part d'hommes et de femmes appartenant à des pays qui souvent, il n'y a pas très longtemps se considéraient comme des ennemis. N'en doutons pas, la population de notre planète ne pourra tirer que des avantages de l'observation de leur comportement.

Une des conséquences des programmes de recherches mis en commun entre les équipes de différentes nationalités sera aussi la mise à niveau non seulement des connaissances, mais aussi des méthodes d'investigation et des moyens d'exploration des domaines les plus avancés en recherche scientifique.

Mais la retombée la plus importante sur le plan humain pourrait simplement être l'existence même de cette station spatiale, devenue le symbole le plus évident d'une humanité en quête de progrès, passant au-dessus de nos têtes plusieurs fois par jour, se jouant de cette invention artificielle que sont nos frontières et animée par un équipage multiculturel et multiracial en parfaite harmonie.

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